La nouvelle procédure allemande de médiation du redressement – la conciliation à l’allemande ?
Conformément à l’article 94 alinéa 1er StaRUG, la médiation du redressement peut être demandée par un débiteur, qui ne se trouve pas en état d’insolvabilité ou de surendettement. Contrairement au nouveau cadre de restructuration, l’outil phare de la loi StaRUG, l’insolvabilité imminente n’est pas une condition préalable à la mise en place d’une procédure de médiation, mais la requête peut être motivée par l’objectif d’éviter l’insolvabilité imminente d’une entreprise.
La requête du débiteur doit comporter les informations suivantes :
- l’objet de l’entreprise
- le type de difficultés économiques et financières
- une liste des créanciers
- un état du patrimoine
- une déclaration du débiteur selon laquelle il ne se trouve pas en état d’insolvabilité ou de surendettement.
Conformément à l’article 94 alinéa 1er StaRUG, le tribunal de la restructuration compétent désigne une personne physique :
- qualifiée
- expérimentée dans les affaires
- indépendante des créanciers et du débiteur
en qualité de médiateur du redressement.
La procédure ne peut être mise en place qu’à la seule initiative du débiteur. Même si cela n'est pas expressément réglementé par la loi, il semble que le débiteur peut également soumettre une proposition portant sur la personne du médiateur qui lie le tribunal, à condition que la personne proposée soit qualifiée, expérimentée en affaires et indépendante. Conformément à l’article 100 alinéa 2 StaRUG, le médiateur peut par la suite être également désigné en qualité de mandataire de la restructuration. En ce qui concerne cette fonction, le législateur a expressément prévu un droit de proposition du débiteur, liant le tribunal (art. 74 alinéa 2 phrase 1 StaRUG).
Conformément à l’article 95 alinéa 1er phrase 1 StaRUG, le médiateur du redressement est désigné pour une période allant jusqu’à trois mois. À la requête du médiateur, qui requiert l’approbation du débiteur et des créanciers impliqués dans les négociations, la période de désignation peut être prolongée de trois mois supplémentaires au maximum.
Conformément à l'article 95 alinéa 2 StaRUG, la désignation ne fait l’objet d’aucune publicité légale afin d’éviter que les réactions négatives du public impactent la procédure. La procédure n’est pas pour autant confidentielle dans la mesure où aucune disposition spécifique n’interdit aux participants d’en faire état auprès de personnes étrangères à la procédure.
Une relation de confiance doit être créée à la fois entre le débiteur et les créanciers et avec le médiateur du redressement, sur la base de laquelle une solution commune peut être élaborée afin de surmonter les difficultés économiques du débiteur. C’est le rôle central du médiateur, intermédiaire neutre, d’œuvrer pour un redressement.
À cette fin, le médiateur du redressement prendra d’abord connaissance de la situation économique du débiteur et déterminera les intérêts des parties concernées. En vertu de l'article 96 alinéa 2 StaRUG, le débiteur autorise le médiateur à consulter ses livres et documents d’entreprise et lui communique les renseignements pertinents demandés. Sur cette base, le médiateur mène des discussions séparées ou conjointes, en toute confiance, avec les parties concernées et s’investit pour la conclusion d’un accord entre elles, afin de promouvoir le redressement.
Le médiateur du redressement remet au tribunal un rapport mensuel écrit sur l’avancée de la médiation. Ce rapport comprend au minimum des informations sur
- le type et les causes des difficultés économiques ou financières
- le cercle des créanciers impliqués dans les négociations et des autres parties
- l’objet des négociations et
- l’objectif et l’avancée prévisible des négociations.
Ces informations devraient permettre au tribunal de prendre connaissance de l’avancée de la procédure et de rendre une décision appropriée s’appuyant sur ces éléments.
À leur demande, les rapports doivent être mis à la disposition des créanciers concernés. Conformément à l’article 96 alinéa 4 StaRUG, le médiateur est tenu d’informer le tribunal lorsqu’il a eu connaissance de la survenance de l’état d’insolvabilité ou de surendettement du débiteur. Toutefois, le médiateur n'est pas soumis à une obligation permanente de vérification. Il ne doit signaler un tel fait que s'il est évident.
Conformément à l’article 95 alinéa 5 StaRUG, le médiateur du redressement est placé sous la surveillance du tribunal de restructuration, qui peut le révoquer pour motif grave. A titre d’exemple, l’on se trouve en présence d’un motif grave si le médiateur n’est pas indépendant ou ne remplit pas ses obligations d’établir et communiquer ses rapports au tribunal. Le médiateur du redressement doit être entendu avant la décision. Aucune autre sanction n'est envisagée, en particulier aucune responsabilité particulière n'est prévue. Les parties sont elles-mêmes responsables du contenu des accords conclus.
Conformément à l’article 97 alinéa 1er StaRUG, un accord amiable de redressement conclu par le débiteur avec ses créanciers, et auquel des tiers peuvent aussi participer, peut être constaté par le tribunal de restructuration, à la requête du débiteur.
Sans que cela affecte la validité de l’accord, la constatation par le tribunal est refusée si le concept de redressement sur lequel est fondé l’accord amiable
- n’est pas concluant ou
- ne se base pas sur la situation réelle, ou
- n’a aucune perspective raisonnable de succès.
Conformément à l'article 97 alinéa 2 StaRUG, il incombe dans ce contexte au médiateur de fournir une expertise sur les conditions nécessaires d'une constatation et les motifs de refus. Ce faisant, le médiateur doit indiquer si, à son avis, les mesures décrites peuvent éliminer durablement la raison de la crise ou si elles sont manifestement insuffisantes. Si le médiateur a accompagné les négociations entre les parties concernées, la requête en constatation par le tribunal peut être combinée avec l'avis du médiateur.
L’avantage de la constatation de l’accord réside dans une protection contre le risque d’actions révocatoires ultérieures conformément aux articles 97 alinéa 2 et 90 StaRUG. Une action révocatoire reste cependant possible
- si la constatation de l’accord de redressement est fondée sur des informations inexactes ou incomplètes du débiteur et
- l’autre partie en avait connaissance.
Il convient de noter qu'il pourrait néanmoins y avoir un risque de contestation des actes réalisés en exécution de l'accord, puisque ceux-ci sont régulièrement exécutés sur cette base, mais en dehors de l'accord proprement dit.
Conformément à l’article 98 StaRUG, le médiateur du redressement a droit à une rémunération adaptée. Celle-ci se détermine suivant l’investissement en temps et en matériel pour les missions liées à la médiation du redressement. Par ailleurs, les articles 80 à 83 StaRUG s’appliquant par analogie, la rémunération est calculée sur une base horaire au taux standard de 350 euros au maximum. Sous réserve de l'accord du débiteur et de la prise en compte des particularités de chaque cas d’espèce, d'autres modèles de rémunération prévoyant une rémunération plus élevée peuvent être convenus.
Les fonctions du médiateur prennent fin avec sa révocation ou à l’expiration de la période pour laquelle il a été nommé. Conformément à l’article 99 alinéa 1er StaRUG, il est révoqué à sa propre requête ou à la requête du débiteur, par exemple, lorsque la relation de confiance est rompue. Une telle requête peut être déposée à tout moment, sans motif. Conformément à l'alinéa 2, le débiteur est libre de demander la nomination d'un autre médiateur. Les créanciers n'ont aucune influence sur la nomination ou la révocation, la procédure étant initiée par le débiteur. La révocation se fait d’office lorsque le médiateur a signalé la survenance de l’état d’insolvabilité ou de surendettement du débiteur au tribunal.
Une transition souple est possible entre la médiation du redressement et les instruments du cadre de stabilisation et de restructuration (articles 29-72 StaRUG). Lorsque le débiteur a recours à ces instruments, le médiateur du redressement reste en fonction jusqu'à l'expiration de la période de trois mois (article 95 StaRUG), jusqu'à ce qu'il soit révoqué ou encore jusqu'à ce qu'il soit nommé mandataire de la restructuration conformément aux articles 73 et suivants StaRUG.
Si la procédure de médiation est largement inspirée par le mandat ad hoc et la conciliation française, les différences sont néanmoins importantes. Force est de constater qu’en droit allemand, cet instrument reste fermé au débiteur en état de cessation de paiement, contrairement au régime français, qui permet à un débiteur d’avoir recours à la conciliation, s’il se trouve en cessation de paiement depuis moins de 45 jours. Dans le régime allemand, la constatation d’un accord amiable n’est pas dotée de la force exécutoire, contrairement à l’accord constaté ou homologué dans le cadre d’une conciliation en France. En France également, les personnes ayant consenti un nouvel apport de trésorerie au débiteur, dans le cadre d’une conciliation clôturée par l’homologation d’un accord, profitent d’ailleurs d’un privilège en cas d’ouverture d’une procédure collective ultérieure. Aucun dispositif comparable n’est prévu dans le cadre de la nouvelle procédure de médiation de droit allemand. Malgré ces différences, la nouvelle procédure de médiation du redressement ouvre de nouvelles perspectives en Allemagne. Il faut espérer qu’elle aura autant de succès que le mandat ad hoc et la conciliation en France.
Ellen Delzant, Avocate, Rechtsanwältin (Avocate en Allemagne)
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